Repenser les abords des écoles : comment le Cerema accompagne la ville de Marseille vers une rue plus apaisée

Introduction

Les abords des écoles sont aujourd’hui au cœur de multiples tensions urbaines. Flux automobiles denses, stationnements anarchiques, risques pour les piétons, nuisances sonores et atmosphériques rendent ces espaces particulièrement conflictuels. À Marseille, ville dense et motorisée, cette situation a longtemps été tolérée comme inévitable.

Mais face aux enjeux croissants de santé publique, de sécurité routière et de transition écologique, une nouvelle approche s’impose. Entre 2022 et 2024, un partenariat entre la Ville de Marseille et le Cerema – Direction Territoriale Méditerranée a permis d’outiller la transformation des abords scolaires, avec une méthode reproductible, intégrée, et fondée sur des retours d’expériences concrets.

Contexte : Des abords d’école sur-occupés et sous-adaptés

À Marseille, les abords des écoles illustrent le déséquilibre hérité d’un urbanisme centré sur la voiture. On y observe une forte conflictualité entre usagers : voitures garées sur les trottoirs, circulations simultanées des piétons et véhicules, vitesses excessives, manque de visibilité. Les mesures classiques de sécurité routière (ralentisseurs, zones 30, interdictions de stationner) se sont révélées nécessaires mais insuffisantes.

Dans un contexte plus large, Marseille s’est engagée dans une démarche de transition : objectif de neutralité carbone à l’horizon 2030, amélioration de la qualité de l’air (avec une astreinte de l’État orientée vers des actions concrètes), développement des mobilités actives et du cadre de vie.

C’est dans ce cadre que le Cerema a été mobilisé pour structurer une réponse durable à la problématique des abords d’école.

Une approche en trois volets : méthodologie, inspiration, hiérarchisation

Le partenariat Cerema–Ville de Marseille s’est structuré autour de trois volets complémentaires, visant à apporter une aide opérationnelle aux porteurs de projets urbains dans les quartiers.

1. Aide méthodologique aux porteurs de projets

Premier objectif : construire une méthode d’intervention pas-à-pas, fondée sur les retours d’expérience locaux et nationaux. Le Cerema a élaboré un guide d’aide à la décision, mis en ligne sur Ceremadoc, structuré autour de plusieurs outils :

• Analyse des contextes urbains

• Boîte à outils techniques pour chaque type de rue

• Pré-programmes adaptés aux scénarios de transformation (piétonisation, fermeture partielle, modération)

• Outils de pilotage visuel (tableaux de bord)

• Synthèse en 10 recommandations clés

Cette approche a permis de standardiser une méthodologie d’aménagement, tout en laissant la souplesse nécessaire à son adaptation locale.

2. Carnet d’inspirations pour visualiser le changement

Pour rendre les projets plus concrets et inspirer les parties prenantes, le Cerema a produit un Carnet d’inspirations illustré, avec l’appui des paysagistes-concepteurs marseillais TOPO*GRAFIK. Il contient trois scénarios types de pacification, adaptés à des contextes de voirie fréquemment rencontrés.

Grâce au format interactif ArcGIS StoryMaps, il permet de visualiser les « avant/après », et d’ouvrir la réflexion sur les potentiels de transformation d’une rue. L’objectif est de fédérer élus, techniciens, enseignants et habitants autour d’une vision partagée de la rue apaisée.

3. Outil d’aide au choix de projet par école

Dernier volet : la hiérarchisation des actions, à partir d’une analyse multi-critères menée école par école. Trois dimensions ont été étudiées :

• Criticité à agir : sécurité, pollution, bruit

• Faisabilité technique : contraintes, accessibilité, gestion

• Opportunité : articulation avec d’autres projets (cours d’école, plan de circulation, budget participatif…)

Chaque école fait ainsi l’objet d’une fiche synthétique intégrée dans une cartographie interactive, en ligne sur la plateforme Cartagene du Cerema. L’outil n’impose pas de hiérarchie, mais donne aux décideurs toutes les clés pour prioriser et phaser leurs interventions.

Co-bénéfices des projets : bien plus que de la sécurité

Pacifier les abords des écoles, ce n’est pas seulement sécuriser des passages piétons. C’est amorcer une transformation en profondeur de la rue et du quartier. Parmi les co-bénéfices observés ou attendus :

• Réduction du bruit et de la pollution (meilleure qualité de l’air)

• Encouragement à la marche dès le plus jeune âge

• Amélioration de l’autonomie des enfants

• Création d’îlots de fraîcheur et de sols perméables

• Réappropriation des espaces publics par les habitants

• Contribution aux objectifs des Plans Climat et Plans de Mobilité

Ces projets deviennent alors des leviers pour une ville plus saine, plus vivable et plus équitable.

Une méthode reproductible, un outil national

Même si le projet a été initié à Marseille, la méthodologie développée par le Cerema vise une diffusion nationale. Le guide méthodologique, le Carnet d’inspirations et les outils d’aide au choix sont tous en libre accès et peuvent être adaptés par d’autres collectivités, quelle que soit leur taille.

Cette approche met en avant une vision intégrée de l’aménagement, qui combine mobilité, santé, climat et participation citoyenne.